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DISCOURS

cevoir qu’il n’y ait rien de réel, dans ces fantômes qui les épouvantent. Mais ce qui surprend davantage, c’est que la mort même, qui vient mettre fin aux maux de l’homme, et qui devrait engloutir la superstition, semble au contraire lui donner plus de forces. L’imagination passe les limites du tombeau, et porte les terreurs au-delà de la vie. Les portes de l’enfer s’ouvrent, pour laisser voir à l’âme superstitieuse des rivières de feu, les noirs torrens du Styx, et des fleuves de larmes. Là, elle aperçoit d’épaisses ténèbres, remplies de spectres hideux et de figures affreuses, qui poussent des cris et des gémissemens effroyables. Là, se présentent à son esprit épouvanté, des juges, des bourreaux, des tourmens, enfin des abîmes et des cavernes pleines de misères et de douleurs. »

Encore si la superstition n’enfantait que les craintes, elle ne nuirait qu’aux cervelles étroites. Mais elle a causé tant de maux à l’humanité entière ! Elle a élevé les hérésies, les schismes, les guerres de parti, les tribunaux secrets, les inquisitions, les Au-to-da-fé, les croisades ; elle a allumé, dans toute la terre et dans tous les siècles, des bûchers perpétuels contre la liberté de la pensée ; elle a inspiré les ravages,