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Abano. Voy. Pierre d’Apone.

Abaris, grand prêtre d’Apollon, qui lui donna une flèche d’or sur laquelle il chevauchait par les airs avec la rapidité d’un oiseau ; ce qui a fait que les Grecs l’ont appelé l’Aérobate. Il fut, dit-on, maître de Pythagore, qui lui vola sa flèche, dans laquelle on doit voir quelque allégorie. On ajoute qu’Abaris prédisait l’avenir, qu’il apaisait les orages, qu’il chassait la peste ; on conte même que, par ses sciences magiques, il avait trouvé l’art de vivre sans boire ni manger. Avec les os de Pélops, il fabriqua une figure de Minerve, qu’il vendit aux Troyens comme un talisman descendu du ciel : c’est le Palladium qui avait la réputation de rendre imprenable la ville où il se trouvait.

Abdeel (Abraham), appelé communément Schoenewald (Beauchamp), prédicateur à Custrin, dans la Marche de Brandebourg, fit imprimer à Than, en 1572, le Livre de la parole cachetée, dans lequel il a fait des calculs pour trouver qui est l’Antechrist et à quelle époque il doit paraître. Cette méthode consiste à prendre au hasard un passage du prophète Daniel ou de l’Apocalypse, et à donner à chaque lettre, depuis a jusqu’à z, sa valeur numérique. A vaut 1, b vaut 2, c vaut 3, et ainsi de suite. Abdeel déclare que l’Antéchrist est le pape Léon X. Il trouve de la même manière les noms des trois anges par lesquels l’Antéchrist doit être découvert. Ces trois anges sont Huss, Luther et un certain Noé qui nous est inconnu.

Abd-el-Azys, astrologue arabe du dixième siècle, plus connu en Europe sous le nom d’Alchabitius. Son Traité d’astrologie judiciaire a été traduit en latin par Jean de Séville (Hispalensis). L’édition la plus recherchée de ce livre : Alchabitius, cum commento, est celle de Venise, 1503, in-4o  de 140 pages.

Abdias de Babylone. On attribue à un écrivain de ce nom l’histoire du combat merveilleux que livra saint Pierre à Simon le Magicien. Le livre d’Abdias a été traduit par Julius Africanus, sous ce titre : Historia certaminis apostolici, 1566, in-8o .

Abeilard. Il est plus célèbre aujourd’hui par ses tragiques désordres que par ses ouvrages théologiques, dont les dangereuses erreurs lui attirèrent justement les censures de saint Bernard. Il mourut en 1142. Vingt ans après, Héloïse ayant été ensevelie dans la même tombe, on conte (mais c’est un pur conte) qu’à son approche la cendre froide d’Abeilard se réchauffa tout à coup, et qu’il étendit les bras pour recevoir celle qui avait été sa femme. Leurs restes étaient au Paraclet, dans une précieuse tombe gothique que l’on a transportée à Paris en 1799, et qui est présentement au cimetière du Père-Lachaise.

Abeilles. C’était l’opinion de quelques démonographes que si une sorcière, avant d’être prise, avait mangé la reine d’un essaim d’abeilles, ce cordial lui donnait la force de supporter la torture sans confesser[1] ; mais cette découverte n’a pas fait principe.

Dans certains cantons de la Bretagne, on prétend que les abeilles sont sensibles aux plaisirs comme aux peines de leurs maîtres, et qu’elles ne réussissent point, si on néglige de leur faire part des événements qui intéressent la maison. Ceux qui ont cette croyance ne manquent pas d’attacher à leurs ruches un morceau d’étoffe noire lorsqu’il y a une mort chez eux, et un morceau d’étoffe rouge lorsqu’il y a un mariage ou toute autre fête[2].

Les Circassiens, dans leur religion mêlée de christianisme, de mahométisme et d’idolâtrie, honorent la Mère de Dieu sous le nom de Mérième ou de Melissa. Ils la regardent comme la patronne des abeilles, dont elle sauva la race en conservant dans sa manche une de leurs reines, un jour que le tonnerre menaçait d’exterminer tous les insectes. Les revenus que les Circassiens tirent de leurs ruches expliquent leur reconnaissance pour le bienfait qui les leur a préservées.

Solin a écrit que les abeilles ne peuvent pas vivre en Irlande ; que celles qu’on y amène y meurent tout à coup ; et que si l’on porte de la terre de cette île dans un autre pays et qu’on la répande autour des ruches, les abeilles sont forcées d’abandonner la place, parce que cette terre leur est mortelle. On lit la même chose dans les Origines d’Isidore. « Faut-il examiner, ajoute le père Lebrun dans son Histoire critique des superstitions, d’où peut venir cette malignité de la terre d’Irlande ? Non, car il suffit de dire que c’est une bourde, et qu’on trouve en Irlande beaucoup d’abeilles. »

Abel, fils d’Adam. Des docteurs musulmans disent qu’il avait quarante-huit pieds de haut. Il se peut qu’ils aient raisonné d’après un tertre long de cinquante-cinq pieds, que l’on montre auprès de Damas, et qu’on nomme la tombe d’Abel.

Les rabbins ont écrit beaucoup sur Abel. Ils lui attribuent un livre d’astrologie judiciaire qui lui aurait été révélé et qu’il aurait renfermé dans une pierre. Après le déluge, Hermès-Trismégiste le trouva : il y apprit l’art de faire des talismans sous l’influence des constellations. Ce livre est intitulé Liber de virtutibus planetarum et de omnibus rerum mundanarum virtutibus. Voy. le traité De essentiis essentiarum, qu’on décore faussement du nom de saint Thomas d’Aquin, pars IV, cap. ii. Voy. les Légendes de l’Ancien Testament.

Abel de la Rue, dit le Casseur, savetier et mauvais coquin qui fut arrêté, en 1582, à Coulommiers, et brûlé comme sorcier, magicien,

  1. Wierus, De præstigiis, lib. VI, cap. vii.
  2. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. II, p. 16.