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n’est plus avec eux. La terre sainte, qui était le plus fertile et le plus beau pays du monde, maudite depuis dix-huit siècles, est devenue si misérable qu’elle ne nourrit plus ses rares habitants. Partout les juifs se sont vus mal tolérés. Souvent on les poursuivit pour des crimes imaginaires ; mais leur histoire est souvent chargée de crimes trop réels. On les chassa de l’Espagne, qu’ils voulaient dominer ; et sans cette mesure la Péninsule serait aujourd’hui la proie des juifs et des Maures. Souvent, sans doute, on mit peu d’humanité dans les poursuites exercées contre eux ; mais on ne les bannissait pas sans leur donner trois mois pour s’expatrier, et ils s’obstinaient à demeurer dans les pays où leurs têtes étaient proscrites.

Parmi les moyens que l’on employait pour les découvrir, il en est un singulier que rapporte Tostat dans son livre des Démons : c’était une tête d’airain, une androïde, qui, en Espagne, dit-il, révélait les juifs cachés…

Ils faisaient l’usure et dépouillaient les chrétiens dans les contrées où ils étaient soufferts ; puis, quand ils avaient tout ravi, les princes qui avaient besoin d’argent les faisaient regorger avec violence. Dans de tels cas, ils essuyèrent surtout de grandes vexations chez les Anglais. Le roi Jean fit un jour emprisonner les riches juifs de son royaume pour les forcer à lui donner de l’argent ; un d’eux, à qui on arracha sept dents l’une après l’autre, en l’engageant de la sorte à contribuer, paya mille marcs d’argent à la hui-

 
Des Juifs, à Constantinople, dirent qu’ils seraient les seuls qui entreraient au paradis — Page 381
Des Juifs, à Constantinople, dirent qu’ils seraient les seuls qui entreraient au paradis — Page 381
Des Juifs, à Constantinople, dirent qu’ils seraient les seuls qui entreraient au paradis — Page 381.
 
tième. Henri III tira d’Aaron, juif d’York, quarante mille marcs d’argent et dix mille pour la reine. Il vendit les autres Juifs de son pays à son frère Richard pour le terme d’une année, afin que ce comte éventrât ceux qu’il avait déjà écorchés, comme dit Matthieu Paris… En général, lorsqu’on tolérait les juifs, on les distinguait des autres habitants par des marques infamantes.

« Avant de quitter Jaffa, dit un illustre voyageur, je ne vous parlerai pas d’une coutume que vous ignorez peut-être et qui est établie chez les Grecs de cette ville. Chaque soir, pendant le carême, les petits enfants des familles grecques vont à la porte des maisons chrétiennes et demandent avec des cris monotones, qu’on prendrait pour une complainte, du bois ou des paras (liards) pour acheter du bois. — Donnez, donnez, disent-ils ; et l’an prochain vos enfants seront mariés ; et leurs jours seront heureux ; et vous jouirez longtemps de leur bonheur.

» Le bois que sollicitent ces enfants est destiné à brûler les juifs. C’est le soir du jeudi saint des Grecs qu’on allume les feux ; chaque petite troupe allume le sien. On fabrique un homme de paille avec le costume juif, et la victime en effigie est ainsi conduite devant le feu, au milieu des clameurs et des huées. Les enfants délibèrent gravement sur le genre de supplice auquel il faut condamner l’Israélite ; les uns disent : Crucifions-le, il a crucifié Jésus-Christ ; les autres : Coupons-lui la barbe et les bras ; puis la tête ; d’autres enfin : Fendons-le, déchirons-lui les entrailles, car il a tué notre Dieu. Le chef de la troupe, prenant alors la parole : — Qu’est-il besoin, dit-il, de recourir à tous ces supplices ? Il y a là un feu tout allumé ; brûlons le juif. — Et le juif est jeté dans les flammes. — Feu, feu, s’écrient les enfants,