ACTE PREMIER
Un cabinet du palais de Sifroid : portes latérales de chaque côté, au deuxième plan ; au milieu et sur le devant de la scène, un fourneau et dessus un alambic et ses accessoires. – Côté gauche, un guéridon avec tapis et sonnette. – Dans le fond, un peu à gauche, un grand fauteuil.
Scène PREMIÈRE.
(Ils ont tous des longues-vues.)
- Savants de tous pays,
- Réunis,
- Pour donner notre avis,
- Voyons ; notre devoir
- Est de voir…
- Ce que nous allons voir.
Scène II.
Mathieu Lansberg. (Il remet la cassette au premier Savant, qui la dépose sur le guéridon placé derrière lui. À l’arrivée de Mathieu Lansberg, tous les Savants se prosternent respectueusement.)
- Salut, noble assemblée !
- Je viens, et j’apporte un philtre divin,
- Fait pour une tête couronnée ;
- Il ne peut être que souverain.
- Seulement, attendez
- Et regardez !
- Attendons et regardons.
Mathieu Lansberg verse quelques gouttes de l’alambic dans un flacon, et chante) :
|
|
- S’il faut en croire Aristote,
- Vous savez, nobles savants,
- Que la Vénus hottentote
- N’eut jamais, jamais d’enfants.
- Son cerveau, par les migraines,
- S’était, dit-on, raplati,
- S’était, dit-on, tout raplati.
- Or, notre prince a les siennes,
- Qui l’ont de même abruti,
- Qui l’ont aussi fort abruti.
- Le cas, messieurs, est fort grave,
- C’est à nous d’y remédier ;
- Songeons que notre Margrave
- N’a pas encore d’héritier.
- Messieurs de mon, etc.
- Ce philtre est donc une essence,
- Un alcali volatil,
- Dont l’odeur et la puissance
- Lui rendront l’esprit subtil.
- C’est un élixir, en somme,
- Qui, d’un effet immédiat,
- Régénère encor mieux l’homme
- Que le gymnase Triat.
- Si, par amour de la science,
- En attendant, vous voulez,
- Sur vous faire une expérience,
- Voici mon philtre ; parlez.
- Soit en boisson, soit en compresse,
- À deux fins il peut servir.
- En loch, messieurs, il engraisse ;
- Mais en poudre il fait maigrir.
- Messieurs, de mon spécifique, etc.
- Gloire au savantissime
- Mathieu Lansberg !
- Au maître illustrissime
- Du grand Albert !
- Il n’y a pas son pareil
- Sous le soleil.
Et maintenant, doctes savants, vous, venus des quatre coins du monde pour m’aider de vos admirables conseils, écoutez-moi ! Vous le savez, nous vivons sous un margrave, ennemi de la fraude : Sifroid, le