Page:Jal - Glossaire nautique, 1848.djvu/8

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moins le temps ne nous serait pas mesuré d'une manière avare. Il n'en fut pas tout à fait ainsi.

Gardiennes vigilantes de la fortune publique, les Commissions du budget et des comptes de la Chambre des députés, que nos précédents travaux auraient dû rassurer peut-être, conçurent une certaine inquiétude, lorsqu'à la fin de l'année 1846 elles ne virent point notre œuvre achevée. Elles s'étonnaient que les fonds votés pour les études relatives au Glossaire fussent si longtemps improductifs : nous devions donner satisfaction à une impatience que nous ne pouvions modérer, car il ne dépendait point de nous que l'on vînt prendre connaissance de notre manuscrit pour savoir ce qu'avait fait jusque là l'auteur du Glossaire.

Cet aiguillon n'était pas le seul qui nous pressât. Quelques honnêtes personnes, de celles qu'on trouve toujours prêtes à troubler ce calme de couvent dont on a tant besoin lorsqu'on est appliqué à de longs et sérieux travaux de critique, blâmaient tout haut dans les ports, ou signalaient officieusement à la Chambre, la lenteur calculée que nous apportions, pensaient-elles, à la confection de notre Répertoire polyglotte. Sans doute nous n'étions tenu à rien envers ces hommes, qui, par un sentiment que nous ne voulons point qualifier, se portaient pour les contrôleurs de notre activité, et affectaient de transformer en une stalle de chanoine indolent le siège laborieux que nous occupons depuis dix-sept ans à la Section historique; mais il est de ces petits tourments devant lesquels on ne sait pas toujours être fort et résolu ! Aussi provoquâmes-nous tout de suite les ordres du ministre, qui annonça à la Commission des comptes que le Glossaire nautique serait sous presse à la fin de cette année.

Il était nécessaire que nous entrassions dans les détails qu'on vient de lire; ils suffiront pour nous justifier aux yeux des savants, s'ils remarquent que nous n'avons pas rempli tout le cadre tracé dans le plan exposé plus haut.

Notre ouvrage est moins complet que nous ne l'aurions voulu. Il nous fallait du temps, à défaut d'auxiliaires; le temps nous a été marchandé. On a pensé que six années étaient largement suffisantes pour un labeur immense et fatigant; on n'a pas considéré que nous étions le seul ouvrier de l'édifice à élever; on ne s'est pas rappelé que Johnson mit huit ans à achever son Dictionnaire, relativement beaucoup moins difficile à composer que ce Glossaire; on ne s'est pas demandé quel nombre d'années consacrèrent, à la composition de livres analogues à celui-ci, des congrégations religieuses, placées, sous tous les rapports, dans des circonstances bien autrement favorables pour leur exécution, que celles où peut être un homme d'études, même le plus reclus, qui a des devoirs à remplir comme père de famille et comme citoyen.

Si le Glossaire nautique n'est pas tout ce que nous avions espéré qu'il serait, la faute n'en est donc pas à nous. On jugera, par ce que nous publions, si nous étions capable de faire ce qui manque à ce livre, et si, en effet, son parfait achèvement n'était pas seulement une question de temps.

Que l'on ne croie pas cependant que notre travail arrive au public tellement mutilé qu'il soit indigne de quelque estime. Nous osons dire qu'à peu près tout ce qui était essentiel, c'est-à-dire tout ce qui devait naturellement trouver place dans un Glossaire proprement dit, on le trouvera dans ce volume. Ce que nos lectures nous ont signalé de mots difficiles à comprendre, tombés en désuétude, mal expliqués ou restés sans interprétation, nous l'avons admis d'abord dans ce recueil. Quelques termes anciens nous auront échappé sans doute; on n'en sera pas surpris: nous ne pouvions lire tous les livres et nous procurer tous les manuscrits.

Quant aux termes et