je vous dise ? C’est là une telle considération qu’il me semble impossible de passer outre. Vous ne comptez pas, je suppose, vous obstiner à votre projet C’est une responsabilité épouvantable.
La voix de Mme Guitton avait une douceur hypocrite, une bienveillance insinuante que René ne remarqua pas. Il s’était levé, et, arpentant le salon à grands pas, il s’écriait :
— Alors, je dois renoncer au bonheur, me résigner à vivre sans Edmée ? Mais c’est impossible ! Plutôt la mort ! Vous ne savez pas, vous ne pouvez pas savoir combien je l’aime ! Il me semble que je n’existe que par elle, que pour elle, qu’avec elle… Ma vie a besoin d’elle… comprenez-vous ? comme… comme… je ne sais pas, moi ! Enfin, elle m’est aussi indispensable que l’air que je respire, que le pain que je mange, que l’eau que je bois… Je ne peux pas me passer d’elle !
— Mon pauvre garçon ! c’est absurde, tout cela. Vous raisonnez comme un enfant gâté… Songez qu’en épousant Edmée, vous signez peut-être son arrêt de mort ! Comment avez-vous le courage de vous obstiner ?
— Je ne m’obstine pas, madame. Je sais très bien que mon mariage est impossible… Mais vous ne pouvez pas m’empêcher de le déplorer !
Il s’était laissé retomber dans un fauteuil de velours vert, et il continuait sans trop se soucier de ses contradictions perpétuelles :
— Et puis, tout cela est absurde. Edmée est condamnée par un docteur à ne jamais se marier. Et si ce docteur se trompe ? Je ne suis certainement pas très fort en médecine, mais il me semble incroyable