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LE RESTE EST SILENCE…

— Petit, il faut manger.

Lui-même se force pour me donner le bon exemple, il verse une cuillerée dans sa bouche et fait un effort pour l’absorber, comme s’il avait mal à la gorge.

— Je n’ai pas faim, lui dis-je.

Je repousse mon assiette. Je vois qu’il voudrait sévir, me forcer à avaler mon potage, mais il serait obligé d’en faire autant, et il n’a pas le courage.

Il sonne, Élise entre et, familièrement :

— Ces messieurs n’ont pas faim ?

— Enlevez la soupe, fait mon père sans répondre plus directement.

On nous sert un plat de viande, entouré de légumes. Papa coupe la viande.

— Tu vas me faire le plaisir de manger un peu.

Mais la même comédie recommence…


Quand la table est desservie et qu’Élise n’est plus là, nous nous regardons tous les deux. Je comprends bien que nous avons le même désir de nous jeter dans les bras l’un de l’autre, mais nous ne le faisons pas :