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Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/241

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toutes ses formes, ne pas me confiner en moi, mais connaître les destinées les plus variées, être matelot, corsaire, chercheur d’or, soldat ! Hélas ! c’est donc pour avoir souhaité un maximum de vie que j’ai fini par la solitude absolue, comme si, isolé dans un désert, je pouvais rêver toute cette intensité exaltante, que je n’ai pas connue, ou comme si, à celui qui a trop désiré, le néant seul peut donner du repos ! Pour humer le relent de ces existences violentes, je me suis mêlé à elles, je me suis roulé dans la crapule. Combien de nuits ai-je passées à boire de l’alcool de dernière qualité avec les mariniers de la Tamise, qui, à la moindre discussion, mettaient le couteau à l’air ! J’étais heureux quand l’un d’eux me semblait plus brutal, plus intéressé, plus vil que les autres. J’en faisais le confident de mes expéditions, mon compagnon préféré ; je lui donnais de l’argent ! J’étais fier de lui. Un de ces étranges amis assassina un de ses camarades, pendant une orgie, pour quelques pence qu’il l’accusait de lui avoir dérobés. « Voici l’homme, me disais-