Page:James - Le Tour d’écrou (trad. Le Corbeiller), 1968.djvu/109

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XIV

C’était très bien d’avoir pu garder le contact avec eux, mais leur parler se révéla, autant que jamais, un effort au-dessus de mes forces. Vue de près, la situation d’aujourd’hui me présentait des difficultés aussi insurmontables que les précédentes. Cette situation dura un mois, avec de nouvelles aggravations, des traits particuliers, dont le plus saisissant, qui s’accentua de jour en jour, était l’ironie, consciente et légère, de mes élèves. Ce n’était pas — j’en suis aussi certaine aujourd’hui qu’alors — l’effet seulement de mon infernale imagination ! il était facile de discerner qu’ils étaient au courant de mes embarras, et que nos étranges relations transformaient, en une certaine manière, l’atmosphère dans laquelle vous vivions — et cela dura longtemps. Je ne veux pas dire qu’ils clignaient de l’œil ou qu’ils fissent rien de vulgaire, car, pour cela, il n’y avait rien à craindre d’eux. Ce que je veux dire, du moins, c’est que l’élément innommé et insaisissable grandissait entre nous aux dépens de tout le reste et que, pour éviter avec tant de bonheur les occasions scabreuses, il fallait entre nous un bien fort consentement tacite.

Les choses se passaient comme si, par moments, nous arrivions en vue d’objets devant lesquels il nous fallait tourner court, abandonnant subitement des routes qu’on s’apercevait être des impasses, fermant, avec un bruit qui