Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/104

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Suisse allemande, à se rendre au Congrès général qui sera convoqué par l’initiative des Fédérations elles-mêmes. Il pourra s’y convaincre de la réalité de nos assertions. Nous ne croyons pas commettre une indiscrétion en ajoutant que Greulich nous a dit que, s’il était délégué au Congrès de l’Internationale, il voterait, après les dernières expériences, contre l’institution du Conseil général.


Voici comment le Bulletin raconte l’adoption, par la quasi-unanimité du Congrès, du principe d’une organisation centralisée, ce qui, naturellement, eut pour résultat la retraite des cinq délégués jurassiens :


Le dimanche soir, le Congrès rentra en séance… [Après divers débats sur des questions préjudicielles,] commença la discussion générale sur le programme et l’organisation de la future Association que le Congrès se proposait de créer.

Deux orateurs seulement purent être entendus dans cette séance : Pindy, délégué de la Fédération jurassienne, et Henri Wenker, délégué de cinq sociétés ouvrières de Neuchâtel. Ils parlèrent tous les deux contre le projet de créer un Comité central suisse, ajoutant que la première chose à faire était d’organiser les fédérations corporatives de métiers et les fédérations ouvrières locales.

Après ces deux discours, la séance fut levée sur la proposition d’un délégué suisse allemand, dont nous regrettons d’ignorer le nom et qui dit galamment, en se tournant vers les délégués de langue française qui siégeaient à gauche, « qu’à mesure que les discours augmentaient en quantité ils diminuaient en qualité », saillie bruyamment applaudie par la majorité.

Le lundi matin, à l’ouverture de la séance, un certain nombre de délégués de la majorité déposèrent une proposition dont voici le sens :

« Considérant qu’il s’est manifesté hier, dans la discussion générale, des tendances qui mettent en question l’existence même de l’Association que le Congrès a pour but de fonder, nous proposons, pour couper court à toute discussion, de voter préalablement sur cette question : Le Congrès veut-il, oui ou non, la création en Suisse d’une Association ouvrière (Arbeiterbund) centralisée ? »

Cette proposition fut immédiatement mise aux voix, et l’unanimité des délégués répondit affirmativement sur la question de la centralisation, à l’exception de cinq voix négatives.

Les cinq opposants déposèrent alors sur le bureau une déclaration dont il fut donné lecture ; puis ils quittèrent le Congrès, où ils n’avaient plus rien à faire.

Voici le texte de la déclaration de la minorité :

« 1o Prenant acte de la déclaration faite hier par le bureau du Congrès à un délégué du Grütli, d’après laquelle les points du programme doivent être réalisés non par l’intervention de l’État, mais par l’initiative des sociétés ouvrières[1], nous donnons notre adhésion à ce programme. Il est

  1. Cette déclaration très réelle du bureau du Congrès est assez difficile à concilier avec les explications données par les mêmes hommes sur la nécessité de faire intervenir l’État dans les questions sociales. Mais ce n’est pas notre affaire. (Note du Bulletin.)