Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/341

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dont Thiers et Gambetta étaient les chefs. Plusieurs des réfugiés de Genève avaient, à cette occasion, publié des lettres, l’un, Colonna, « aux ouvriers manuels de la France », un autre, Perrare, « aux travailleurs manuels lyonnais » ; un troisième, Lefrançais, « aux électeurs français » ; un quatrième, Jules Montels, « aux socialistes révolutionnaires du Midi de la France ».

De France, un socialiste nous envoya un article que le Bulletin publia (n° 12), et où il disait : « L’habileté de Thiers l’emporte sur la bêtise de Mac-Mahon, et la République bourgeoise est fondée... Peut-être fallait-il que l’expérience se fît, et qu’avant d’arriver à son émancipation le peuple épuisât la série gouvernementale. Soit, messieurs les bourgeois : faisons, puisque les ouvriers le désirent, l’essai loyal de votre république. J’espère qu’il ne sera pas long. »


En Belgique, une grève de mineurs dans le Centre-Hainaut agita les esprits pendant les deux premiers mois de 1876. En outre, à Verviers, les ouvriers sans travail tinrent, en janvier, trois réunions pour demander à la municipalité de leur venir matériellement en aide ; car, disaient-ils dans une lettre adressée aux échevins le 19 janvier, « nous tenons à vous le dire, nous sommes à bout et prêts à tout faire si vous ne faites rien pour nous ». Un Congrès extraordinaire fut convoqué par le Conseil régional belge pour le 27 février, avec cet ordre du jour : « Examen de la situation faite par la crise actuelle au prolétariat » ; mais à ce Congrès il n’y eut qu’un échange de vaines paroles.


D’Angleterre, rien, qu’une longue grève de mécaniciens à Erith, et une réunion de l’Union nationale des employeurs où il fut délibéré sur les moyens dont les patrons pourraient user pour résister aux empiétements des Trade Unions : l’assemblée décida qu’à l’avenir les employeurs auraient, eux aussi, leur Comité parlementaire, pour empêcher les Chambres de voter des lois « révolutionnaires » comme celles de l’année précédente.


En Allemagne, le gouvernement de l’Empire demanda au Reichstag d’introduire dans le Code pénal un article punissant de la prison quiconque exciterait les différentes classes de la population les unes contre les autres, ou attaquerait les institutions du mariage, de la famille et de la propriété. L’article proposé fut repoussé par l’assemblée, à deux reprises et à l’unanimité, malgré les efforts du comte Eulenburg et de Bismarck.


Notre correspondant de Russie consacra une longue lettre à exposer la condition du paysan russe, à propos d’une rébellion des paysans du district de Valouiki, dépouillés de la propriété de leur forêt par la puissante famille Chidlovsky, et d’une autre rébellion au village de Néfédia, pour un motif analogue. « Ce sont toujours les paysans qui ont tort, même quand ils ont raison : j’entends raison au point de vue légal, — car pour moi je pense que ni les paysans ni les ouvriers ne sauraient jamais avoir tort dans ces affaires-là. »


En Suisse, la Section de langue française de Zürich, adhérente à la Fédération jurassienne, écrivit au Comité fédéral la lettre suivante : « Nous avons pensé qu’il serait bon qu’on imitât en divers endroits de l’Europe l’exemple donné par les ouvriers danois qui ont remis à l’ambassade française à Copenhague la protestation que le Bulletin nous a apportée. Nous avons donc écrit à la Section allemande de l’Internationale à Zürich, avec laquelle nous entretenons des rapports amicaux, la lettre ci-jointe. Nous la prions de prendre l’initiative d’une protestation analogue parmi les ouvriers de la Suisse allemande. » La lettre à la Section allemande de Zürich, datée du 1er janvier 1876, disait : « Nous avons pensé, chers coreligionnaires, que le noble exemple donné par Copenhague doit être suivi par nos amis de l’Internationale, répandus en Europe et en Amérique... Nous vous prions d’inaugurer ce mouvement en Suisse. Que la République de l’Helvétie adresse quelques paroles solennelles à la République Thiers-Mac-Mahon-Gambetta. Rappelez-la, non pas à la géné-