Aller au contenu

Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/373

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais lors même que les Sections de la Suisse romande se trouveraient, du moins pour un temps, réparties entre deux fédérations, est-ce là une raison pour qu’il existe entre ces deux fédérations, nous ne disons pas de l’hostilité, mais même un refroidissement ? Non certes. La plus parfaite intelligence règne entre nous et les fédérations de Lyon, de Paris, de la Belgique, etc. ; pourquoi n’en serait-il pas de même entre les deux fédérations de la Suisse romande ?

La seconde voie de conciliation, c’est précisément de reconnaître comme un fait légitime l’existence séparée des deux fédérations, et de travailler à établir entre elles les liens nécessaires de solidarité : en particulier, d’unir les caisses de résistance des deux fédérations, pour qu’elles puissent se prêter un appui mutuel.

Cette proposition, venue des délégués de Neuchâtel, a été bien accueillie, nous sommes heureux de le dire, par les délégués de Genève : et nous espérons que les deux Comités fédéraux chercheront sérieusement à la réaliser le plus tôt possible.

La discussion s’est terminée par un toast fraternel que Guillaume, l’un des délégués de Neuchâtel, a porté aux Sections de Genève, au nom de la fédération dont la Solidarité est l’organe.

La Solidarité du 28 mai publia la note suivante :

« Le Comité fédéral romand (du Jura) a écrit au Comité fédéral à Genève pour lui demander son adhésion à une fédération uniforme des caisses de résistance. Il espère recevoir une réponse dictée par des sentiments fraternels, suivant les intentions manifestées au meeting de Vevey par les délégués de Genève.

« Chaux-de-Fonds, 20 mai 1870.

« Le Comité fédéral. »

Malheureusement, si les dispositions conciliantes avaient jamais existé autrement qu’en apparence dans le cœur des hommes du Temple-Unique, elles furent éphémères, et la guerre, comme on verra, allait bientôt reprendre de plus belle. Il n’est pas téméraire de croire que l’intervention de Londres en fut la principale cause, car c’est le 13 mai, cinq jours après le meeting de Vevey, que le Comité fédéral de Genève expédia la circulaire par laquelle il portait à la connaissance des Sections de son groupe cette « Communication privée » du Conseil général, du 1er janvier 1870, que le Comité genevois avait d’abord tenue secrète[1].

La campagne de propagande se continuait aux Montagnes avec succès. Le 15 mai, une réunion tenue à Cortébert (Val de Saint-Imier) décida de provoquer dans les localités, à la fois industrielles et agricoles, du bas du Vallon la fondation de nouvelles Sections, et de convoquer à cet effet un meeting à Corgémont pour le dimanche 5 juin. Ce même jour, 15 mai, à Cernier, le principal village du Val de Ruz, le centre du radicalisme dans ce district neuchâtelois, une assemblée populaire, où le notaire Soguel, politicien radical, prit la défense de l’idée de patrie et fit l’éloge des libertés suisses, et où le serrurier Treyvaud, de Nouchâtel, lui répondit de façon à le démonter complètement, amena de nouvelles adhésions à l’Internationale. Le meeting de Corgémont, auquel j’assistai, ainsi que Schwitzguébel et Heng, réunit trois cents personnes, qui firent un accueil

  1. La date du 13 mai est celle que porte l’exemplaire de cette circulaire qui se trouve dans la collection de Nettlau, comme je l’ai dit au tome Ier (p. 262, note 3). Je répète que l’existence de cette circulaire du Comité fédéral de Genève était restée ignorée de nous, et que je n’en ai eu connaissance que par une communication de Nettlau en 1905.