Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/510

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« High Holborn, Londres W C, le 28 juillet 1869.

À la Section de l’Alliance de la démocratie socialiste à Genève.

Citoyens,

J’ai l’honneur de vous annoncer que vos lettres ou déclarations, aussi bien que le Programme et Règlement, ont été reçus et que le Conseil général a accepté votre adhésion comme Section à l’unanimité.

Au nom du Conseil général :
Le secrétaire général, J. G. ECCARIUS. »

« Au citoyen Heng, secrétaire de la Section de l’Alliance de la démocratie socialiste,
à Genève.
Citoyen,

J’ai bien reçu votre lettre avec la somme de 10 fr. 40 c, représentant la cotisation de 104 membres, pour l’année 68-69... Dans l’espoir que vous pratiquerez activement les principes de notre Association, recevez, cher citoyen Heng, de même que tous les amis, mes salutations fraternelles.

H. JUNG,
secrétaire pour la Suisse auprès du Conseil Général.
25 août 1869. »


Puis je lus ces deux questions :

1° Ces lettres sont-elles authentiques ?

2° Y a-t-il eu depuis le 25 août 1869, date de la dernière, une décision du Conseil suspendant, conformément à la résolution VI du Congrès de Bâle, la Section de l’Alliance de la démocratie socialiste ?

Jung, qui présidait la séance, fait un discours diffus où il raconte longuement l’histoire d’une lettre qu’il a écrite à Guillaume après le différend suisse, lettre laissée sans réponse[1]. Je lui avais déjà expliqué familièrement la cause de cet insignifiant malentendu. Enfin, pressé de questions, il finit par avouer qu’il a écrit la seconde lettre (ce qui prouve en même temps l’authenticité de la première). Engels bredouille aussi quelques mots, mais, après un gros quart d’heure de divagations, il est impossible de nier les deux lettres.

En réponse à la première question, j’écris : Oui.

Pour la seconde, Engels rebredouille : « Vous préjugez la question, il faut attendre la Conférence, etc. — Pas du tout, dis-je, ce que je demande est simple : l’Alliance est-elle suspendue, oui ou non ? — Mais, dit Marx qui enrageait d’être pris au piège, elle n’est pas en règle avec le Conseil[2]. — Je vais donc écrire en réponse à la seconde question : Non, mais elle l’est de fait, comme n’étant pas en règle avec le Conseil général. (Or l’on sait que sur vingt Sections, dix-neuf au moins sont dans ce cas.) — Mais non, dit Marx. — Que dois-je mettre alors ? — Mettez : Non ; mais tout cela se réglera à la Conférence (sic). »

J’écris, et je passe le papier au secrétaire pour le contresigner, et y mettre le sceau du Conseil.

« Faites-moi voir cela, dit Marx ; c’est encore une nouvelle machine contre nos amis, et il y a à Genève une Section russe que je veux prévenir (!!!). » Quel commentaire ajouter à cela[3] ?

L’écrit était en deux doubles : l’un pour l’Alliance, l’autre pour le Comité fédéral siégeant à Genève, tous deux étant prévenus que l’autre en recevait une copie. Marx n’était pas habitué à cette manière

  1. Voir ci-dessus, pages 17-18 et 46.
  2. C’est-à-dire qu’elle est en retard pour le paiement de ses cotisations.
  3. Cette scène, qui s’est passée le 25 juillet 1871, a été racontée dans le Mémoire de la Fédération jurassienne, où, par erreur, je l’ai datée « d’un soir du mois de juin ». J’avais, dans le Mémoire, abrégé le récit de Robin, et adouci quelque peu les formes de son langage.