Page:Jametel - La Corée avant les traités, souvenirs de voyages.djvu/41

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de l’année, ce qui les rend d’une utilité presque nulle, comme base d’opérations pour les navires de guerre du Tsar. Les ports de la presqu’île coréenne sont, au contraire, accessibles pendant toute l’année, et, occupés par une grande puissance occidentale comme la Russie, ils se transformeraient rapidement en des places de guerre de premier ordre, d’où la Russie pourrait exercer sur les mers de l’Extrême-Orient une influence désormais prépondérante, puisqu’elle n’aurait à lutter que contre des adversaires dont les bases solides d’opérations seraient ou en Europe ou en Amérique. Seulement, dans l’Asie orientale, comme dans l’Asie centrale et occidentale, la diplomatie moscovite aura à lutter, dès qu’elle tentera un mouvement en avant, avec un ennemi bien plus redoutable que les hommes d’états asiatiques dont la finesse ne sert le plus souvent de rien, parce qu’elle ne s’appuie sur aucune base solide. Dans l’avenir, la Chine ne sera plus seule à défendre, contre les attaques du Japon ou de la Russie, son vassal de Séhoul ; car les progrès de la seconde de ces puissances, qu’ils se fassent au nord, au sud, à l’est ou à l’ouest, sont toujours arrêtés par les efforts persévérants de la Grande-Bretagne, qui ne tardera point vraisemblablement à conclure une alliance tacite avec le Fils du Ciel, pour protéger les états de ce dernier contre les dangers qui le menacent du côté du nord.

Quelles seront les péripéties du drame qui se jouera sur la nouvelle scène qui vient d’être ouverte à l’antagonisme anglo-russe, dans l’Extrême-Orient ? C’est ce qu’il est impossible de prévoir. Une pièce du même genre s’est jouée, et se joue encore actuellement sur les bords du Bosphore ; déjà le rideau s’y est abaissé sur la fin de plus d’un acte ; tout permet de croire que le drame approche de sa fin, et cependant les plus habiles de nos hommes politiques en sont encore à faire des conjectures au sujet de son dénouement probable. Comment pourraient-ils donc prévoir la fin de celle qui va se jouer sur les bords de la mer Jaune, et dont ils n’ont encore vu que le prologue ? Quoi qu’il en soit, on peut déjà estimer que l’action ne sera point un simple dialogue, et que, autour des deux premiers personnages, l’Angleterre et la Russie, iront se grouper un plus ou moins grand nombre de comparses, dont l’apparition et la sortie de la scène constitueront une source inépuisable de complications imprévues et de changements à vue. Parmi les comparses, nous pouvons déjà en nommer deux, sans aucune crainte de nous