Page:Jammes - De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir.djvu/272

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Telle est la vie. J’ai vu, haut, devant ses brebis,
et défaisant de l’air à sa flûte de buis,
le berger les compter une à une, et puis

se remettre à marcher à côté de son âne
qui portait les bidons vers la brumeuse montagne
où les herbes odoriférantes font le bon fromage.

Entre les haies fanées les dernières mélisses
à l’odeur fade et forte, aux fleurs blanches, flétrissent
sans que l’abeille d’or, aux ailes nervées, y glisse.

Dans le buffet poli les poires sont trop mûres
et, de la treille jaune, il tombe au pied du mur
des grains de raisins noirs que le froid rend durs.

Les premiers petit-houx, coriaces et piquants,
portent des boules lisses, rouges comme du sang,
dont on fait des bouquets d’automne charmants.

Engourdie par le froid, au soleil se repose
une sauterelle. Là-bas une belle rose
éclatée va mourir comme meurent les choses…