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LA FIANCÉE

Oh ! que c’est ennuyeux… C’est la seconde fois…
Ça m’était arrivé il y a deux ou trois mois.

LE POÈTE

Tu pourrais les mettre à sécher près de la grange
où la génisse et la vache ne passent pas…
Il y a une corde en osier à des échalas…

LA FIANCÉE

Près de la grange l’ombre est trop épaisse à cause du noyer.

L’ÂME DU POÈTE, (au poète qu’elle a suivi.)

Ton cœur en ce moment est dans l’ombre du noyer.
Ton bonheur est comme le soleil qui glisse
sur le perron usé, les poules et les glycines
au bois tordu et dur. Là bas, sur la haie,
séchaient les bas légers de ta fiancée
et la vache qui passait les a mangés
parce qu’ils éclairaient le soleil comme l’herbe bleue.
parce que la vache était contente sous le ciel en feu,
parce que tout était bon, parce que tout était doux,
parce que tout était luisant comme le houx,
parce que la vie est comme l’eau qui coule
sur les cressons et les pierres dorées et douces.