Page:Jammes - De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir.djvu/48

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avec des jardins, des vieilles paralysées,
des sons d’angélus, des piaillements de poules,
avec des chants de vêpres et de noires croisées
et des hommes qui chantent et d’autres qui se soûlent ;

avec des églises calmes où, quand il y a
des journées de chaleur, on sent une odeur fade
et fraîche et un si grand silence
qu’on dirait qu’une chaise a grincé dans le froid ;

avec des routes longues et blanches où dansent
les cailloux au soleil, avec des kilomètres,
avec les pigeons des demeures des vieux prêtres,
avec des gens qui rient et d’autres de souffrance ;

avec la nuit qui tombe sur les grands champs,
avec des grincements de char, des paysans calmes
qui semblent réfléchir et qui ont l’air au loin
de se fondre dans la nuit lentement et grands ;

avec de pauvres bœufs qui beuglent dans l’étable,
les cris longs et poignants des cochons qu’on égorge,
avec des verres épais posés sur les tables
et des femmes portant leurs petits sur la gorge ;