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FEUILLES DANS LE VENT

ailes comme l’oiseau qui, tout à coup, s’envola.

Les plantes brillaient au bord des allées : parfois, la lourdeur de feuilles ruisselantes venait frapper nos fronts et nos joues. La Nuit se retourna vers moi, en appuyant en signe de silence, l’index sur sa bouche. Puis, de ce doigt qu’elle avait retiré de ses lèvres, elle me désignait je ne sais quoi dans la profondeur du parc.

Je vis alors venir vers nous des touffes du lilas.

— Regarde ! me dit la Nuit : voici les fleurs animées d’un livre de ton enfance.

Et les lilas s’avançaient en se balançant. Une musique s’élevait, « comme de violes », de leurs grappes fleuries. Nous étions sur une pelouse, les lilas se rangèrent au centre et continuèrent leur mélodie.

Et maintenant, dressant leurs trompettes de nacre, des lis où soufflaient des brises s’unissaient à cette fête mystérieuse. Et quand ils furent auprès des lilas, ils les saluèrent avant que de se mettre en ordre, comme pour je ne sais quelle revue.