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L’OISEAU

Jamais ne meurt pour nous l’oiselle que l’on aime,
puisque revient toujours le Printemps avec elle,
puisque l’amour revient toujours à notre appel.
Si elle avait un nom, ce ne serait pas elle :
elle ne viendrait pas et serait moins fidèle.

LE POÈTE

Ô doux petit oiseau ! Je sens que tu as raison.
Que j’aurais moins souffert si, n’ayant pas de nom,
celle que j’adorai ne se fût pas nommée.
Elle fut arrivée à chaque mois de mai,
aussi belle qu’avant, plus jeune d’une année.
Je comprends que le mal, ô cher petit oiseau,
qui as l’œil rond et la tête en m’écoutant penchée,
je comprends que le mal, c’est que l’on veut connaître,
quand on l’aime beaucoup, le nom de sa maîtresse.



L’oiseau s’envole.