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CHETMA


Souv. du 28 mars 1896.


Souviens-toi des vergers délicieux, des sources vives sous les palmiers, les figuiers et les grenadiers.

Rappelle-toi ces jeunes filles qui vivent en des jardins où règne un éternel crépuscule. Elles plongeaient aux ruisseaux tièdes leurs jambes nues, si fines que l’on eût dit des quenouilles d’ambre longtemps filées et polies par des mains royales.

Elles étaient les filles de l’immortelle beauté.

D’emplir des outres auxquelles on avait conservé la forme d’un animal, une eau en cascade ruisselait sur elles, et, sur elles, nos pensées poudroyaient pareilles à des papillons d’azur.

Dans cette oasis, les jeunes gens étaient beaux et tristes. Ils ressemblaient à des amphores de bronze et de neige dont la ligne ondulerait lentement.

Ils évoquaient des Aladdins mystérieux, des lampes d’or, des palais blancs.