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À CLARA D’ELLÉBEUSE


Au fond du vieux jardin plein de tulipes, ô mémoire pure qui consoles ma vie cruelle, repose.

Je ne t’ai jamais trahie et tu ne m’as jamais trompé. Tu es morte avant que je fusse né, parce qu’au ciel il y a d’admirables roses.

Ô mon enfant, ô mon amie, j’évoque en ce moment le jour où, par une blanche tombée d’automne, tu tiens un petit arrosoir sur des buis que tu arroses.

J’évoque aussi la cour des récréations taciturnes où tu sembles, en habit de communiée, je ne sais quel encensoir de corolle éclose.

Assiste-moi toujours. Lorsque je suis broyé, quand je traîne sous les ormeaux de la petite ville, aux heures bleues de l’angelus nocturne, mon doute et mon orgueil, pose ta main sur mon front qui bourdonne, ta blanche main… pose…