Aller au contenu

Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/82

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
74
DANS LA BRUYÈRE


Victor Hugo, Laprade, Hello ! C’étaient nos dieux,
Les phares flamboyants dans notre nuit profonde ;
Et l’austère pensée animait tout un monde
Où l’Idéal chantait en des vers radieux.

Les lettres d’Ozanam nous apprenaient à croire ;
Et dans sa prose immense aux murmures géants,
Pareille à la clameur des sombres océans,
Châteaubriand berça notre jeune mémoire.

De ces beaux jours perdus que nous est-il resté ?
Ah ! ne maudissons pas cette vie éphémère !
Si l’avenir trompeur a tué la Chimère,
Si le réel brutal a flétri la Beauté,

Du moins nous avons eu la vision sans bornes
De tout ce que Dieu fit grand, généreux, divin :
Quand on aime si haut on n’aime pas en vain,
Et quelque chose en reste au fond des âmes mornes.