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Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/262

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déjà qu’elle ne l’est pas complètement), nous pouvons voir l’application des deux lois inverses : 3º Les souvenirs de la fugue ont disparu et cela d’une manière extraordinaire, mais en même temps ont disparu, plus ou moins complètement, les pensées et les sentiments relatifs à l’idée qui dominait pendant la fugue. J’ai déjà fait remarquer que le jeune Rou… était un excellent garçon épicier, s’intéressant à la vente du sucre et du café, rêvant à se promener avec sa mère le dimanche à la foire de Saint-Cloud, et n’ayant rien des goûts d’un marin aventurier. Il n’a pas dans sa vie normale, d’une manière continuelle, ce désir de voyage, il est même très affligé quand on lui parle de ses fugues, il a peur qu’elles ne recommencent, puisqu’il vient lui-même et tout seul se faire soigner pour les éviter. J’insiste sur ce point : si ce garçon avait réellement toute sa vie le goût des expéditions au delà des mers, ce qui est possible après tout, il ne devrait pas se préoccuper de ses fugues, il devrait se résigner à ces escapades en se disant que leur succès sera avantageux pour lui. C’est ce qu’il ne fait en aucune manière, car dans sa vie normale il n’a pas les mêmes sentiments que pendant sa période de fugue. On constate le même fait chez l’employé de chemin de fer P…, une fois réveillé, il ne parle plus du tout de l’accusation de son frère de la même manière; non seulement il sait bien qu’elle est fausse, mais il sent surtout qu’elle est insignifiante; il sent que cela ne vaut pas la peine de déranger son ménage et sa carrière. Il y a là évidemment quelque chose qui rappelle l’amnésie de la mort de sa mère et la disparition des sentiments d’affection filiale que nous avons notée chez Irène à propos des idées fixes à forme somnambulique. 4º Pendant l’état dit normal, on retrouve le développement des phénomènes psychologiques qui étaient absents pendant la période de crise : souvenir de la vie entière, perception de tous les