Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/74

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De ces études, bien des auteurs tireront une conclusion radicale : c’est que c’est là une amnésie absurde et qu’elle n’existe pas. Il est ridicule de supprimer les phénomènes simplement parce qu’on ne les comprend pas. Sans doute c’est là une amnésie bizarre, c’est pour cela que nous la déclarons différente des autres. Sans doute elle se modifie étonnamment dans une foule de circonstances; c’est pour cela que nous devons étudier ces circonstances, et comprendre leur rôle. Mais cela ne supprime pas le symptôme pathologique lui-même, qui n’en est pas moins très grave, très pénible, et qui peut troubler des malades pendant des années.

Je ne crois pas non plus que ces amnésies puissent s’expliquer rapidement par l’imitation ou la suggestion. Sans aucun doute il y a des idées fixes en même temps que l’amnésie; j’ai même soutenu que ces deux phénomènes étaient presque toujours inséparables, mais ces idées fixes ne portent aucunement sur l’amnésie elle-même et sur ses caractères. Les idées fixes de ces malades portent sur des événements de leur vie, sur des désirs ou des rêves, et point du tout sur le fait d’oublier telle ou telle chose. Bien au contraire, le sujet préoccupé par son chagrin serait plutôt disposé à croire qu’il ne doit jamais l’oublier, et cependant on observe de tels oublis dans tous les temps et dans tous les pays.

Cette amnésie est un véritable trouble dans l’évolution des idées : elles ne sont pas détruites, elles sont correctement formées, mais il leur manque quelque chose; elles restent isolées; elles ne peuvent être évoquées que par elles-mêmes; elles ne sont pas suffisamment rattachées à l’ensemble des autres phénomènes conscients. Il y a là un manque d’unité et de synthèse qui semble être un défaut d’achève-ment dans la formation d’idées suffisantes à d’autres points de vues.

Nous parvenons à une conclusion semblable