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Page:Janin - Œuvres diverses, série 1, tome 1, 1876.djvu/37

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traînait en longueur son petit ménage du soir, afin que la Reine pût voir la chandelle brûler cinq minutes de plus.

Douze jours se passèrent ainsi ; mais le douzième jour les juges arrivèrent : ils procédèrent à un premier interrogatoire ; ils firent coucher un officier dans la chambre royale. La Reine ne se coucha pas.

Le 15 octobre on vint la prendre à huit heures du matin pour la faire passer dans la salle d’audience. Elle dormait : on la réveilla en sursaut ; elle était à jeun, on la laissa à jeun. Elle parla comme parlent les anges ! Elle trouva dans son cœur cet appel à toutes les mères qui fit pâlir les héros de septembre et qui arracha des applaudissements et des larmes aux tricoteuses d’en haut. À quatre heures de l’après-midi la séance fut suspendue ; et alors un des geôliers voulut se souvenir que la Reine n’avait encore rien pris de la journée. Il y avait neuf heures qu’elle se débattait contre les bourreaux de Louis XVI, la pauvre femme ! On lui apporta un bouillon. C’était sa jeune servante bretonne Rosalie qui le devait présenter. Mais, comme elle passait par la grande salle pour se rendre près de la Reine, un commissaire de police arracha le bouillon aux mains de Rosalie. Ce commissaire de police, nommé Labuzière, était camard et bossu ; il avait pour maîtresse une fille