Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/131

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Au bout du pont Royal, sur le quai d’Orsay, non loin de l’ancien hôtel de MM. les gardes du corps du roi, un café de sérieuse apparence est rempli tout le jour d’une foule d’honnêtes gens qui viennent prendre en ce lieu leur repas du matin et leur repas du soir. On y parle à voix basse, et, si parfois quelque étranger s’égare en ces salons bien hantés, il prend soudain le diapason des habitués du café de la rue du Bac ; si bien que les femmes les plus distinguées ne redoutent pas d’y venir, en compagnie de leur frère ou de leur mari.

Un beau jour du mois de juin (il avait plu dans la matinée et le pavé était encore humide), un carrosse à l’ancienne marque, sorti des ateliers d’Erlher, et conduit par un cocher aux cheveux blancs, déposa sur le seuil du café une vénérable dame du faubourg Saint-Germain, accompagnée de sa nièce, une personne sérieuse, qui avait déjà dépassé la vingtième année. Elle-même, la nièce, avait pour chaperon, mieux qu’une servante, une amie, uns sœur de lait. Celle-ci s’appelait Mariette ; elle avait dix ans de plus que sa compagne ; elles se tutoyaient l’une et l’autre,