Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/192

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Des aumônes, estime des gens de bien, jamais rien qui approchât du doute ni de l’impiété ; mais impérieuse, altière, dominante, moqueuse, et tout ce que la beauté et la toute-puissance qu’elle en tirait entraînent après soi. Résolue enfin de mettre à profit un temps qui ne lui avait été donné que malgré elle, elle chercha quoiqu’un de sage et d’éclairé, et se mit entre les mains du P. de la Tour, ce général de l’Oratoire si connu par ses sermons, par ses directions, par ses amis, et par la prudence et les talents de gouvernement. Depuis ce moment jusqu’à sa mort, sa conversion ne se démentit point, et sa pénitence augmenta toujours.

« Peu à peu, elle en vint à donner presque tout ce qu’elle avait aux pauvres. Elle travaillait pour eux plusieurs heures par jour à des ouvrages bas et grossiers. Sa table, qu’elle avait aimée avec excès, devint la plus frugale ; ses jeûnes fort multipliés, et à toutes les heures elle quittait tout pour aller prier dans son cabinet. Ses macérations étaient continuelles ; ses chemises et ses draps étaient de toile jaune la plus dure et la plus grossière. Elle portait sans cesse des bracelets, des jarretières et une ceinture à pointes de fer, et sa langue, autrefois si à craindre, avait aussi sa pénitence. Elle était, de plus, tellement tourmentée des affres de la mort, qu’elle payait plusieurs femmes dont l’emploi unique était de la veiller. Elle couchait tous ses rideaux ouverts, avec beaucoup de bougies dans sa chambre ; ses veilleuses autour d’elle, qu’à toutes les fois qu’elle se réveillait, elle voulait trouver causant, jouant ou mangeant, pour se rassurer contre leur assoupissement.

« Parmi tout cela, elle ne put jamais se défaire de l’extérieur de reine qu’elle avait usurpé dans sa faveur et qui la suivit dans sa retraite. Il n’y avait pe