Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/254

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de grands bateaux, accompagnées de la musique
des dieux marins, et, chaque troupe étant à sa place, les Poitevines
dansèrent avec la cornemuse, les Provençales avec les cymbales, les
Bourguignonnes et les Champenoises dansèrent avec accompagnement de
hautbois, de violes et de tambourins ; les Bretonnes dansaient les
passe-pied et les branles de leur province. D’abord tout alla le mieux
du monde ; une grande pluie arrêta soudain toute la fête.

Au retour de ce beau voyage, la jeune princesse Marguerite s’en fut
rejoindre au Plessis-les-Tours (la ville favorite du roi Louis XI) son
frère le duc d’Anjou, qui déjà, à seize ans, avait gagné deux batailles.
Il était, évidemment, le favori de la reine mère et déjà très ambitieux.
Il choisit pour confidente sa sœur Marguerite : « Oui-da, lui dit-elle,
et comptez, Monsieur mon frère, que moy estant auprès de la royne ma
mère, vous y serez vous-mesme et que je n’y serai que pour vous ! »

Ainsi, déjà si jeune, elle entrait, par la faveur de la reine mère et
par la confiance de son frère, dans les secrets de l’État. Bientôt
les ambassadeurs se présentèrent pour solliciter la main de la jeune
princesse. Il en vint de la part de M. de Guise, il en vint au nom du
roi de Portugal, enfin le nom du prince de Navarre fut prononcé. Ce
dernier mariage était dans les volontés de Catherine de Médicis. La
veille de ce grand jour, le roi de Navarre avait perdu la reine sa mère,
il en portait le deuil, et il vint au Louvre, accompagné de huit cents
gentilshommes, vêtus de noir, demander au roi de France la main de sa
sœur Marguerite. Ils furent fiancés ce même soir, et, huit jours après,
ces Béarnais, vêtus de leurs plus riches habits, menèrent à l’autel
de Notre-Dame de Paris la jeune reine, habillée à la royale, toute
brillante des pierreries de la couronne, et le grand manteau bleu, à