Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

puis la musique et le bal : pendant six semaines. C’est le temps d’une cure ; au bout de six semaines, la santé est revenue.

Il fallut donc repartir, mais en six semaines, déjà, que de changements dans la province ! Elle était à feu et à sang ; le galant don Juan d’Autriche s’était emparé de Namur et des meilleurs seigneurs de la province. Alors, un grand conflit entre les catholiques de Flandre et les huguenots du prince d’Orange. Or, nécessairement, il fallait traverser toute cette bagarre, en danger d’être prise par l’un ou l’autre parti. Cette fois encore apparut l’évêque de Liège ; il protégea jusqu’à la fin les dames dont il avait été l’hôte assidu. Il leur donna, pour les accompagner, son grand maître et ses chevaux ; mais ces damnés parpaillots manquaient tout à fait de courtoisie. Ils prétendirent que la reine ne pouvait pas rentrer en France avant d’avoir payé toutes ses dettes. Ils nièrent à l’évêque de Liège le droit de signer des passeports. On crie : Aux armes ! sur le passage de la reine, aux mêmes lieux où naguère on criait : Vive la reine ! Ces mêmes portes des villes qui s’ouvraient devant elle à son arrivée se fermaient brutalement à son retour.

Cependant rien n’arrêtait la jeune reine ; elle se savait éloquente, et parlait à la multitude, apaisant celui-ci, souriant à celui-là, également inquiète des Allemands, des Espagnols, des huguenots, de ce même don Juan, naguère empressé comme un amoureux autour de sa fiancée. O peines du voyage ! et cependant la dame avait résolu de rejoindre en toute hâte la cour de Navarre, mais non pas sans avoir salué son frère, le roi de France. Or, laissant là sa litière, elle monte à cheval et s’en va, par des chemins détournés, frapper aux portes de Cambrai. La ville hospitalière accueillit la f