Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/280

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par tant d’obstination, consentit à doter sa fille et à la rendre à son mari, à condition qu’elle maintiendrait la paix entre les deux royaumes.

Ah ! comme elle respira librement lorsqu’elle vit accourir le roi de Navarre au-devant d’elle, accompagné des seigneurs et gentilshommes de la religion de Gascogne ! Ainsi, l’un et l’autre, ils se rendirent à petites journées dans le château de Pau, en Béarn, en pleine religion réformée, et ce fut à peine si la reine Marguerite obtint la permission d’entendre la messe avec quatre ou cinq catholiques. Il fallait, dans ces grands jours, fermer les portes du château, tant les catholiques de la contrée étaient désireux d’assister au saint sacrifice, dont ils étaient privés depuis si longtemps.

Ainsi, fanatisme et cruauté des deux parts ; même on ne saurait croire à quel point le Béarnais poussait la rigueur : jusqu’à chasser à coups de hallebarde ses malheureux sujets catholiques pour avoir assisté à la messe de leur reine. Il y avait cependant un parlement à Pau ; mais c’était un parlement huguenot, qui donna tort à la reine quand elle se plaignit des procédés du roi son mari. C’était bien la peine, en effet, de l’être venue chercher de si loin ! Il supportait péniblement la présence de sa jeune épouse, et finit par la reléguer à Nérac, où elle rencontra, belle, intelligente et bienveillante aussi, sa belle-sœur, la princesse Catherine, amie et confidente du roi son frère. Or Catherine était une grande âme, affable et juste, aimant la liberté de conscience autant qu’elle aimait la belle compagnie.

On ferait un charmant récit de ces deux cours de Nérac, de ces deux religions vivant l’une à côté de l’autre, en toute courtoisie.

Et chaque dimanche, après le prêche, après la messe,