Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/8

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dans son entier ; seulement il se permet de trouver que, dans bien des cas, la question : où allez-vous ? qui êtes-vous ? que demandez-vous ? est des plus embarrassantes. — À de pareilles questions, l’auteur ne saurait que répondre, en vérité.

Cependant il n’ignore pas que même, critique à part, il y a dans le monde une race oisive et redoutable d’innocents gentilshommes qui ne savent pas d’autre occupation que celle de vous interroger à tout propos ; ces gens-là vous les trouverez en tous lieux, sous la forme inquiétante d’un point d’interrogation ? — hommes d’autant plus gênants, qu’ils peuvent vous être fort utiles, car, pour si peu que vous soyez dociles à leurs questions, pour un rien, ils vous suivent très-volontiers partout où vous voulez les conduire. Ces braves gens suivront, tête baissée, votre imagination vagabonde, comme autant de moutons de Panurge ; ils lui tiendront l’étrier au besoin ; seulement il est bien entendu que si vous tenez à en être applaudi longtemps et suivi longtemps, il est absolument indispensable que vous leur expliquiez au préalable le qui ? le quoi ? le  ? le pourquoi ? le comment ? et le quand ? de votre livre ; et, je le répète, par la littérature qui court, rien n’est plus difficile que ces explications au préalable.

Je sais, il est vrai, aussi bien que personne, qu’à son premier voyage dans le domaine des inventions, il serait facile à un écrivain peu timoré d’aborder ces gentilshommes le chapeau à la main ; puis, avec l’humilité d’une préface du dix-septième siècle ou d’un couplet final de vaudeville moderne,