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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/40

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maritime. Les Venètes possédaient un grand nombre de vaisseaux, sur lesquels ils trafiquaient en Bretagne, et la Bretagne les regardait comme ses plus habiles navigateurs. Ils occupaient d’ailleurs, sur une vaste mer, féconde en naufrages, tous les ports, et tout navire étranger leur devait son tribut. Comme ils virent venir à eux les tribuns militaires Silius et Velanius, les Venètes les retiennent, disant, qu’ils ne les rendront que contre les otages confiés à la garde de Crassus. Cet exemple est suivi dans toutes les villes où s’adressent les Romains. Dans les Gaules, toute résolution est prompte et vive ; si bien qu’à l’instant-même, le peuple se remet à la guerre, et que César revient en toute hâte. À la nouvelle de son retour, les Bretons s’encouragent les uns les autres ; ils se fortifient, ils équipent des vaisseaux, ils coupent les chemins, ils affament l’armée romaine. Abandonnés à eux-mêmes dans ce pays peu connu, sans vaisseaux pour tenter cette mer perfide, les Romains s’interrogent avec inquiétude. Dans quel port, sur quelle rade, dans quelle île se fortifier ? Comment se reconnaître dans cette mer sans bornes, qui ne ressemble en rien à cette mer italienne que la terre entoure de toutes parts ? Car les Romains ne connaissaient que la Méditerranée ; sur cette mer domptée par tant de victoires et par tant de grands hommes, ils étaient les maîtres tout-puissants. Mais aux Romains l’Océan faisait peur : les peuples même les plus braves ont toujours peur de l’inconnu. En même temps les Bretons fortifiaient leurs villes ; ils appelaient à l’aide de la chose commune tous les peuples d’alentour : les Osismiens (Finistère et Côtes-du-Nord), les Namnètes, (Nantes), les Ambiens (Amiens), les Morins (le Boulonnois), les Diablintes (le Perche), les Runœpères (partie du Brabant vers la Gueldre), la Bretagne (Angleterre), les Trévires (Trèves), l’Aquitaine (Garonne et Gascogne), les Coralliens, les Coriosilites, les Lexicoviens (Coutances, Quimper et Lisieux). À la nouvelle de cette révolte, César prend soudain toutes les dispositions d’un général habile ; il accourt, il arrive, et pendant qu’il opère une diversion puissante à l’aide de ses capitaines, lui-même il se porte contre les Venètes. — Rude voyage ! « La plupart des villes de cette côte sont situées à l’extrémité de langues de terre et sur des promontoires ; elles n’offrent d’accès ni aux gens de pied quand la mer est haute, ni aux vaisseaux que le reflux laisse à sec sur le sable[1]. »

  1. De Bello Gallico, liv. III.