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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/49

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éteindre chez les Gaulois cette énergie vigoureuse que l’homme puise dans l’austérité de ses croyances, dans le respect qu’il se porte à lui-même et qu’il porte à la religion.

Néron régnait depuis quatorze ans, et l’univers le souffrait, patiente mundo, selon la belle expression de Pline, quand tout à coup le bruit se répandit que la Gaule était en armes. La province lugdunaise avait alors pour gouverneur un Gaulois issu de race royale. Ambitieux d’une espèce bien rare, Vindex n’aspirait qu’à une seule gloire, la délivrance de la patrie. Il fit un appel énergique au vieil esprit gaulois, et soudain la plus grande partie de la Gaule vint se ranger sous les drapeaux de cet homme généreux.

Éclairés cette fois sur les dangers de l’isolement, les révoltés tendirent la main aux légions d’Espagne :

« Viens, écrivait Vindex à Galba ; la Gaule est un corps vigoureux auquel il ne manque qu’un bras pour le diriger. »

L’avénement du vieux Galba fut le premier signal de la délivrance du monde.

Après avoir tenté, mais en vain, d’arracher le Capitole de sa base éternelle, les Gaulois comprirent enfin qu’il était plus facile de transporter, en quelque sorte, le centre de l’empire romain dans les Gaules que d’ébranler cette organisation formidable.

Ce fut là, durant quatre cents ans, le noble rêve de nos ancêtres. La Gaule a toujours eu l’ambition de dominer le monde.

Après Galba vint Vitellius, proclamé sur le Rhin par les légions gauloises et, germaniques. Vers le même temps, un fanatique, qui se prétendait envoyé de Dieu pour venger le pauvre peuple des ravages que les divers partis exerçaient dans les campagnes, réunit sous son drapeau de hasard plusieurs milliers d’hommes ; ces hommes obéissaient à deux mots d’ordre tout-puissants et qui reparaissent toujours dans les époques malheureuses : « Vengeance et Liberté ! » Telle fut la première étincelle de ces terribles révoltes populaires que la misère et le désespoir vont désormais multiplier sous le nom de bagaudie[1]. Maricus, fait prisonnier, fut massacré par les soldats de Vitellius ; mais une nouvelle révolte, la plus terrible de toutes, éclata chez les Bataves, et l’on put espérer un instant que ce serait la dernière. La trahison des Rhèmes et le génie de Cérialis sauvèrent l’empire. — Repos d’un jour ! la semence était jetée dans l’âme des Gaules,

  1. Voir l’Histoire des Origines et des Institutions de la Gaule armor, par M. de Courson.