Aller au contenu

Page:Jarret - Contes d’hier, 1918.djvu/157

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
149
L’INFÂME

Nous avons toujours respecté notre secret. Tout au plus, l’ai-je dit à ma femme, parce que je ne lui cache rien, mais je sais qu’elle sera discrète. Nous y tenons plus que jamais : il ferait beau voir que mon beau-frère apprît la chose. Le moindre bobo de Lucien n’aurait plus d’autre cause. Il a la manie des causes premières. Il essaierait peut-être de prendre sur lui, mais ce serait bien en vain, nous le connaissons le pauvre homme ! Et d’ailleurs, n’y eût-il que le plaisir de lui tenir tête, que je trouverais encore que la partie vaut la peine d’être risquée.

Maitenant, comment l’enfant a-t-il su, lui ? Se peut-il qu’il se souvienne ? N’aurait-il pas plutôt surpris quelque mot révélateur et imprudent ? Ce serait bien possible : tant que nous avons fait maison commune avec Alice il était toujours à nos trousses, ce petit. Une vraie teigne ! Mais si monsieur s’imagine à présent qu’on va lui révéler le fin mot qui le ferait héros d’aventure… Halte-là ! Vous ne passerez pas ! N’empêche qu’il était amusant à voir tout à l’heure, avec ses questions et sa confiance. Et j’ai bien ri dans mes barbes,  en clignant de l’œil du côté de ma femme et de Gilberte.