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CONTES D’HIER

tures. Chère vieille terre ! Depuis si longtemps que je ne l’avais caressée… Enfin je fis beaucoup de couture, — sans me vanter comme disent les gens — et du tricot et des reprises.

L’émotion me gagnait bien souvent en découvrant maints petits ouvrages inachevés. Quand elle était présente, Marie-Anne m’expliquait : « J’en étais si dégoûtée !… Il n’y a pas à dire cousine, tu es venue à temps, je me mourais à petit feu, sans qu’il y parût. Francis m’aime beaucoup et de me voir en cet état le mettait tout chagrin, à preuve qu’il avait dépensé, sans me le dire, pour le petit et pour moi, les trois quarts de nos économies, lui qui en était si fier, pauvre Francis ! Ce n’est pas tout, quand il me voyait trop mal, il me défendait de faire les lits, et préparait lui-même les repas du matin et du soir. Mais ce n’était pas comme toi, vois-tu. J’étais touchée et ma figure larmoyante l’ennuyait ; puis ces besognes de femmes étaient un peu étranges pour ses mains gourdes, il s’impatientait, bousculait les enfants, se tournait les sangs pour la moindre gaucherie. Crois-tu que j’aurais été plus fatiguée en faisant le travail toute seule ? Ah ! pauvre chérie, tu ne