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XVII

Wilfrid fut mis au courant par son père, presque furtivement à la porte même de sa chambre qu’il se préparait à quitter.

À table, il se laissa servir comme de coutume, puis tout d’un coup, dévisageant sa sœur :

— Alors questionna-t-il, tu l’aimes beaucoup et tu vas l’épouser ?

Saisissant à qui il faisait allusion, Bernadette rougit.

— Tu l’aimes beaucoup ? insista Wilfrid.

— Eh bien oui, je l’aime répliqua Bernadette.

Le jeune homme parut se le tenir pour dit et, portant à ses lèvres sa tasse de café, il aspira longuement une gorgée du chaud liquide. Puis, de son ton coutumier, légèrement gouailleur :

— Chambly dit-il : ça me fera loin à aller pour mes raccommodages et mes pressages. Il n’y a pas à dire, il va falloir que je me marie, moi aussi.

La nouvelle n’avait pas fini de se répandre. S’étant rendue chez sa sœur, dans la journée Mme Nadeau lui fit des confidences complètes. La tante Astérie à qui les circonstances avaient toujours été contraires et qui n’avait pu dépenser pour son propre compte sa réserve d’aspirations romanesques n’avait pas de plus grand plaisir que de se mêler aux petites aventures sentimentales des autres. Du moment qu’elle sût ce qui arrivait à Bernadette, la jeune fille passa immédiatement, dans son esprit du rang de déserteuse à celui d’héroine.