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VI

Aurore a depuis bien des jours repris son travail, Donat est parti, le chambreur est revenu et, à la maison, c’est le même train-train que de coutume. On entame déjà la première semaine de septembre et un automne anticipé a brusquement succédé aux jours chauds.

C’est à ces époques de froidure, alors que le poêle ne s’éteint plus, que les ménagères avisées songent à faire cuire des fêves au lard. Mme Nadeau n’y avait point failli et, quand elle les vit à peu près à point, elle en emplit certain petit pot de grès à couvercle qu’elle déposa dans le four ; puis, un peu avant que les petits ne revinssent de l’école, elle dit à Bernadette :

— Dépêche-toi de manger avant les autres et tu iras porter ce pot de binnes à ta tante Astérie pour son dîner.

Bernadette fit comme on lui disait et sa mère ayant enveloppé le pot dans une flanelle, puis dans un gros papier, elle le mit sous son bras et partit.

— Si ta tante parle de te garder, avait encore dit Mme Nadeau qui était dans ses largesses, tu pourras rester tant qu’elle voudra.

La jeune fille trouva sa vieille parente geignante et traînant la savate dans la maison où régnait un froid humide car le poêle à gaz qu’on allumait aux seules heures des repas ne répandait qu’un simulacre de chaleur.