Page:Jarret - La dame de Chambly, 1925.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

X

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, dans son lit, la première pensée de Bernadette fut que ce jour était celui de son départ. D’hésitations, il ne lui en restait plus et, chaque fois qu’elle en eut la possibilité, elle se rendit à sa chambre où elle parachevait ses préparatifs. À part sa malle, elle aurait un paquet assez gros à porter. Dans le tramway, on la prendrait pour une fille de campagne qui s’en retourne avec ses emplettes. S’il devenait un obstacle, elle était d’ailleurs bien résolue à abandonner son bagage plutôt que de renoncer au départ. C’est quand on est parvenu à ce degré de décision que les évènements se groupent d’eux-mêmes à notre convenance.

Cependant, les heures fuyaient… Les petits revinrent de l’école et, comme d’habitude, Bernadette leur servit tout de suite à manger, puis, son père et Aurore arrivèrent aussi. Quand elle eut nettoyé et rangé la vaisselle de ce dernier repas, la jeune fille se retira dans sa chambre.

Sa mère était restée dans la cuisine où elle se berçait en chantonnant entre ses dents.

Tout à coup sa voix parvint jusqu’à la chambre :

— Bernadette, qu’est-ce que tu fais ?

— Je range mes tiroirs, répondit la jeune fille.

Vingt minutes au moins s’écoulèrent. Mme Nadeau se berçait toujours ; seulement, elle ne chantait plus. Bernadette était prête à partir. — « Entre deux heures et quatre » avait indiqué la dame. Au premier moment propice, elle filerait, quitte comme elle l’avait prévu à abandonner son bagage s’il devenait