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XV

Les trois jours qui suivirent valurent à Bernadette un bonheur presque sans mélange. Non pas que Jules lui fît de grandes déclarations ni même qu’il se montrât fréquemment à elle, car ce fut précisément le contraire qui se produisit : mais une joie ineffable emplissait quand même à le déborder son cœur et, la privant en quelque sorte de sa faculté de penser, la laissait s’enliser dans un rêve de douceur.

Jules se retirait chez le notaire Lafontaine et, après l’office religieux du matin, il se rendait chez sa vieille amie où il dinait des mets préparés par Bernadette. Assez tôt, il prenait congé et Mme Beauchemin et Bernadette retournaient elles-mêmes à l’église. Entre temps Mme Beauchemin apprenait à sa protégée comment elle avait connu Jules par son frère, le P. Elzéar, comment le jeune homme succéderait un jour à son autre frère, le notaire et comment enfin il n’en était pas à sa première visite chez elle.

— Mais cette fois concluait-elle en souriant, il a trouvé la place prise. J’avais déjà un fils : me voici avec un fils et une fille. Que la vie est belle, Yolande !

Trois jours passent vite surtout quand ils sont marqués au coin du bonheur. Bernadette est déjà sur son départ. Elle emporte la promesse de M. Larose d’aller la retrouver rue Plessis le dimanche qui suivra Pâques : lui-même retournera à la ville par le dernier tramway, mais il attendra, pour se présenter à la famille Nadeau que Mme Beauchemin ait écrit.

Maintenant, Bernadette file à toute allure vers Montréal et ses préoccupations changent forcément