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Page:Jarret - Moisson de souvenirs, 1919.djvu/72

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MOISSON DE SOUVENIRS

— C’est dame Mahaut, commençai-je en pouffant encore.

Grand’mère eut un geste brusque.

— Voyez-vous, ma sœur, Marcelle se considérant comme parfaite, a bien le droit, n’est-ce pas ? de rire un peu de ses compagnes. D’en rire à gorge déployée, acheva-t-elle avec une violence que je jugeai au moins ridicule.

Dès lors, je ne pouvais, sans malaise, entendre parler de la séance aux sabots.

La première de la classe, la plus talentueuse, la plus raisonnable, et pour employer un mot dont on abuse, la plus distinguée, était sans contredit Flore, élégante blondinette d’une quinzaine d’années. Elle était la seule à qui mère Saint-Roch parlât sur un ton naturel, comme à une grande personne. Gracieuse pour toutes, aimée de chacune, elle était si polie qu’on n’aurait jamais eu l’idée de lui manquer d’égards. Lorsqu’elle recevait des bonnes choses de chez elle, son premier soin était d’en offrir à tout le monde ; naturellement, on lui rendait ensuite ses politesses, mais alors, elle protestait vivement contre tant de gracieuseté et ne se servait enfin que pour obliger et en levant délicatement le petit doigt.

Or, un jour, au lieu de revenir du parloir, avec un visage heureux, comme d’habitude, elle nous apporta un air bouleversé et se mit aussitôt à raconter l’affaire. Intriguée, je m’approchai avec quelques autres et elle recommença pour nous. C’était une petite fille de par chez elle, à qui le diable faisait des malices.