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MOISSON DE SOUVENIRS

Le plus fort de l’intérêt était maintenant passé pour moi, quoiqu’il restât encore les prix spéciaux. À chaque nouvel énoncé, mon cœur battait la charge : serait-ce pour Gonzague ? Pour Jean ? Je n’ai pas conservé le programme et ne me rappelle plus l’ordre, mais je sais qu’en dernier lieu, les finissants vinrent se ranger sur le théâtre et l’un d’eux, se détachant de leur demi-cercle, commença le discours d’adieu. Ils avaient du chagrin, les pauvres finissants de quitter leur collège, après huit ou dix ans de fréquentation assidue et le jeune orateur citait le poète :

Objets inanimés, avez-vous donc une âme,
Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ?

Combien je sympathisais avec eux ! Le supérieur du collège, un vénérable prêtre à cheveux blancs, se leva de son siège d’honneur et se tournant tantôt vers eux, tantôt vers le public, répondit en termes émus à ces grands enfants qui parlaient de le quitter.

Dehors, la rue était encombrée, quand nous sortîmes et le soleil nous éblouit. Ni Gonzague ni Jean ne se présentant, après quelques minutes d’attente, nous nous rendîmes seules à la maison où Camille nous attendait. Tante nous garda à dîner, mon frère et moi et après dîner, Jean me fit voir ses prix, un à un. Qu’il était grand, mon cousin ! C’était sot, mais voici qu’il m’intimidait pour tout de bon. Aussi, nous ne nous voyions pas assez souvent. Malgré tout, je trouvai moyen