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MOISSON DE SOUVENIRS

billets et m’offrait un tour de char. Nous avions toujours été bons amis, mon frère et moi. Munis de la permission de maman, nous partions en sourdine, afin de dépister les enfants qui voulaient toujours nous suivre, et après avoir attendu avec patience, un char ouvert, nous nous installions, autant que possible, au fond ou au bout du banc ; j’enlevais mon chapeau, Gonzague de même, et joyeux, nous prenions notre bain d’air fouetté. Le dimanche, très souvent, par les méchants tramways De Lorimier-Guy-Beaver Hall, nous nous rendions en famille au cimetière : maman y avait, hélas ! presque tous les siens. Par trois fois, Jean qui correspondait avec Gonzague, m’envoya un petit mot… Et je n’ai plus rien à dire de mes vacances.

Jean était à la gare, lorsque nous descendîmes en septembre, mais il fut très vite interpellé, rejoint, taquiné par ses jeunes confrères, des écoliers qui avaient voyagé avec nous ; laissant Gonzague et Jean se joindre à eux, je me rendis seule chez marraine où je ne restai pas longtemps, car la pluie menaçait. En arrivant au couvent, j’eus une longue conversation avec mère Saint-Blaise qui me félicita gracieusement de mon travail, car j’avais mis ma robe de toile, malgré les nuages. Elle m’apprit qu’on la chargeait précisément des ouvrages de fantaisie, cette année et elle me promit une attention spéciale.

Dès le début de cette nouvelle année, mère Sainte-Lucie opéra une réforme qu’elle projetait depuis longtemps et qui consistait à ne former que deux divisions, avec sa vingtaine d’élèves. En conséquence, je fus avec trois autres, versée dans