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Page:Jarry - Les Minutes de sable mémorial, 1932.djvu/148

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LES MINUTES


Pends ton cœur, aérostat, aux
Triples poteaux monumentaux.
Que tout ton lest vidé ruisselle :
Ton lourd fantôme est ta nacelle,
Ancrant ses doigts estropiés
Aux ongles nacrés de tes pieds.

Verse ton âme qu’on étrangle
Aux trois vents fous de ton triangle.

Montre ton cœur au pilori
D’où s’épand sans trêve ton cri,
Ton pleur et ton cri solitaire
En fleuve éternel sur la terre.

Hausse tes bras noirs calcinés
Pour trop compter l’heure aux damnés.
Sur ton front transparent de corne
Satan a posé son tricorne.
Hausse tes bras infatigués
Comme des troncs d’arbre élagués.
Verse la sueur de ta face
Dans ton ombre où le temps s’efface ;