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Page:Jarry Faustroll 1911.djvu/231

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SPÉCULATIONS

mot « savant », comme disent les grammairiens, fut à l’usage de spécialistes qui, de par l’autorité de ces menus péremptoires leurs ordonnances, encourageaient la timidité des âmes naïves précitées à goûter de mets inaccoutumés. Potionem avait un sens plus universel : tout ce qu’il est possible de boire.

La démarcation due au langage a été précisée par divers artifices : poison au delà, potion en deçà ; on a imaginé les doses ; c’est-à-dire qu’on a formulé : certaines substances ne sont bienfaisantes que prises en petite quantité. C’est là une trace, bien conservée, de la vieille superstition empirique, que tout remède devait se rapprocher, autant que possible, de l’or potable, en d’autres termes, être une substance chère. Et on l’administrait à petites doses parce qu’il était impossible de s’en procurer beaucoup, exactement de la même manière que l’on pare les femmes — sans qu’elles se résignent trop volontiers à cette parcimonie — au carat et non au kilo. La fabrication perfectionnée de produits chimiques jadis rares les a faits abondants et par suite en a abaissé le prix. Cette dépréciation diminuerait le prestige moral qu’ils exercent sur le malade, leur valeur curative, si les pharmaciens ne la sauvegardaient — qu’on ne taxe point de cupidité leur sagesse — en vendant, comme il est banal de le répéter, lesdits produits fort cher. Quant à