petit visage où le rouge s’étalait fièrement, ne cédant le
pas qu’à l’éclat du vermillon des lèvres. Tout cela, cependant,
formait un ensemble qui permettait, à distance,
d’imaginer le piquant attrait qu’avait eu au temps jadis
cette physionomie de blonde.
« Cher ami, cria-t-elle par la portière à mon cavalier,
quelle est cette helle enfant ?
—C’est, madame la marquise, la jeune mariée dont je
vous ai parlé.
—Ah ! ma reine, je vous soupirais, reprit-elle ; que
votre mari vous amène bien vite, et dites-lui surtout que
je vous trouve jolie comme un coeur. »
Puis, du bout des doigts, me jetant un baiser, elle
permit à ma jument impatiente de reprendre sa course.
J’étais charmée d’avoir vu s’animer et parler ce véritable
portrait d’ancêtre, sans prétendre cultiver davantage un
voisinage qui n’attrayait guère mes quinze ans.
« Eh bien reprit à son tour le châtelain, j’ai eu dans le
temps de plaisantes séances avec cette même personne.
« Pendant les fréquentes absences de M. de Talaru,
retenu à l’étranger, soit par des fonctions éminentes, ou
des goûts de voyage, la marquise, toutes les fois qu’elle
se trouvait empêchée, me mandait en consultation.
« Un jour, rentrant chez moi, vers cinq heures, je trouve
d’elle trois billets successifs qui réclamaient ma présence.
Inquiet, je me hâte d’accourir. En me voyant,
l’intendant s’écrie :
« Oh ! monsieur, Mme la marquise vous attend avec
tant d’impatience qu’elle en est malade.
—Il n’est pas arrivé malheur, j’espère ?
—Pas que je sache, monsieur. »
« Et il m’introduit dans une pièce immense en fermant la porte sur moi. Je cherche à me diriger dans une demiclarté, quand d’un angle de la chambre part un éclat de voix: