Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/160

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sont donné des allures déplaisantes et fanfaronnes : « A qui le tour et qui veut maintenant toucher des épaules ? » — Eh bien ! tout cela est en pure perte, car ni des congrès catholiques, ni des conférences publiques, ni des mandements, il n’est sorti aucune idée précise qui puisse éclairer la démocratie et aller au cœur du peuple. Quelle voie ont-ils ouverte ? Aucune. Qu’ont-ils proposé d’effectif, de saisissable ? Rien : rien que des puérilités oppressives, et, sur les misères du peuple, une vaine rhétorique ecclésiastique.

Les uns, industriels honorables et pieux, mais d’un zèle un peu intempérant, introduisent de vive force la religion dans les ateliers. Dans toutes les régions de la France, dans le Nord surtout, cet abus de pouvoir a été commis. Ils paraissent croire que, moyennant le salaire quotidien, l’ouvrier livre son âme à discrétion, et ils humilient des consciences libres en des génuflexions forcées. Ils donnent mission au Crucifié d’enseigner la résignation au prolétariat, et, par une inconsciente profanation, ils font du Christ une sorte de patron céleste chargé de veiller sur les intérêts du patron terrestre. Dangereux enfantillage, regretté sans doute dès maintenant par ceux qui s’y sont laissés aller.

D’autres, moines impétueux s’essayant en vain à la diplomatie, se font, devant les foules, bienveillants, tolérants, démocrates. Ils veulent plus que tous autres