Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/166

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seule conscience humaine, la liberté réglée par le devoir qui est le fondement de l’ordre social tout entier.

Il s’agit de savoir si cette morale laïque, humaine, qui est l’âme de nos institutions, pourra régler et ennoblir aussi toutes les consciences individuelles. Il s’agit de savoir si tous les citoyens du pays, paysans, ouvriers, commerçants, producteurs de tout ordre, pourront sentir et comprendre ce que vaut d’être homme et à quoi cela engage. Là est l’office principal de l’école. Nos écoles, depuis qu’elles sont pleinement laïcisées, n’attaquent aucune croyance religieuse, mais elles se passent de toutes les croyances religieuses. Ce n’est pas à tel ou tel dogme qu’elles demandent les principes de l’éducation. Elles sont donc tenues de découvrir et de susciter dans la conscience de l’enfant un principe de vie morale supérieure et une règle d’action. L’enseignement de la morale doit donc être la première préoccupation de nos maîtres.

Il semble bien que beaucoup aient hésité jusqu’ici, et presque éludé cette partie de leur tâche. Peut-être n’y étaient-ils point assez préparés ; peut-être aussi étaient-ils retenus par une sorte de réserve et de pudeur. Qui donc, parmi les hommes, a qualité pour parler au nom de la loi morale et pour exiger le sacrifice de tous les penchants mauvais au devoir ? Comment pourrions-nous, comment oserions-nous, avec nos innombrables faiblesses, parler aux enfants de la