Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/212

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se passe-t-il depuis deux mois ? Dans le département du Tarn, à l’occasion des conseils de revision, M. le préfet convoque dans chaque canton tous les instituteurs et il leur trace leurs devoirs politiques et électoraux; il daigne leur dire que dans le secret de leur conscience ils peuvent penser ce qu’ils veulent — et je ne vois pas comment l’administration la plus subtile pourrait leur retirer ce droit — mais il ajoute : « Si j’apprends que vous ayez formulé une seule opinion qui ne soit pas exactement conforme à la pensée gouvernementale, je vous briserai. »

Et quelle est cette pensée gouvernementale ? Ici commence notre embarras.

Il y a des centres ouvriers dans lesquels il s’agit, avant tout, de combattre le socialisme et de faire appel contre lui, au moins par sous-entendus, à toutes les forces hostiles. Là on dit simplement aux instituteurs : « Avant tout, gardez-vous de toute pensée et de toute parole socialistes. » Puis, dans d’autres cantons, où la question sociale est moins aiguë, où il reste encore quelques républicains qui n’ont pas perdu le souvenir des programmes du passé, on dit aux instituteurs : « Il faut vous tenir à distance égale du socialisme d’un côté et du cléricalisme de l’autre. » Enfin, il y a d’autres cantons où se produisent ceux qu’on appelle les ralliés, et alors, dans le catéchisme préfectoral, ce