Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/360

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France et de la Russie n’aurait pas de beaucoup l’importance qu’une partie de l’opinion y attacherait un peu étourdiment.

Le premier intérêt de la politique française, c’est de rester libre, c’est de rester vraiment elle-même. Or, la politique essentielle d’une démocratie souveraine se résume en deux mots : le maintien de la paix, l’affirmation du droit. Lorsque j’ai indiqué ici même que nous devions attendre les réparations nécessaires du développement de la démocratie, c’est-à-dire de l’idée de justice en Europe, quelques-uns m’ont dit que je nourrissais une chimère. J’en ai causé avec des hommes clairvoyants : ils m’ont dit qu’assurément du triomphe de la démocratie en Europe sortirait la reconnaissance pacifique de notre droit ; mais que bien des réactions étaient à craindre encore, aussi bien en France qu’au dehors. C’est possible, et voilà pourquoi je considère que le premier devoir du patriotisme est de prévenir ces réactions. Or, nous les encourageons et nous les fortifions au dehors par une attitude incertaine qui paraît cacher des arrière-pensées d’agression que nous n’avons pas. Le jour où tout soupçon d’une guerre franco-allemande se serait évanoui, l’autocratie bismarckienne serait en baisse, la démocratie allemande serait en hausse. En France même, le meilleur moyen de prévenir les réactions, c’est d’ouvrir devant le travail de longues perspectives de paix. Je sais bien