Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/387

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Révolution, que le retour des tyrannies féodales ou cléricales est le plus difficile : la Belgique peut être livrée pendant des années au cléricalisme ; le piétisme prussien peut essayer de s’imposer de nouveau à l’Allemagne ; la France est libre jusque dans le fond de son esprit, et l’éducation rationnelle de la nation française achève cette liberté. Donc, toute diminution de la France serait une diminution de la pensée libre.

D’où vient donc qu’on essaie d’imputer à l’ensemble de notre parti une attitude aussi absurde et aussi coupable ? Est-ce qu’on ne peut pas préparer le groupement international des travailleurs sans oublier la patrie ? Mais la Révolution française a été tout à la fois internationaliste et patriote. Elle voulait que les victoires de la France fussent des victoires de l’humanité. Elle repoussait et abattait les tyrans, mais pour préparer l’union cordiale des peuples. Elle faisait appel, dans tous les pays où elle combattait, à tous ceux qui souffraient des tyrannies féodales et cléricales, et elle leur disait : « Venez à moi, nous sommes frères ! Plus de guerres de conquêtes ! Plus de haines de races ! Mais un groupement de peuples libres, se respectant les uns les autres, et travaillant d’un commun effort à l’extirpation des préjugés, à la grandeur de l’humanité unie. » — Et je demande si ce noble internationalisme de la Révolution française l’a empêchée de défendre le sol sacré du pays et de se dresser à toutes les frontières, le